Par Gilbert Leduc, journaliste
Avec tous les véhicules qui circulent sur les routes et qui crachent du dioxyde de carbone (CO2), le transport scolaire et ses 10 000 autobus jaunes ne représentent « qu’une petite goutte » dans l’océan de pollueurs au Québec, affirme Pierre Zivec, vice-président Performance, Sécurité et Digital chez Transdev Canada.
« Cela ne doit pas nous empêcher de mettre l’épaule à la roue pour contribuer à réduire les émissions des gaz à effet de serre », insiste l’expert en électromobilité de la multinationale spécialisée dans le transport des personnes comptant 80 000 employés, dont 1300 au Québec.
Des autobus électriques immatriculés aux fins de transport scolaire, le Québec en comptait à peine 130 en janvier 2021 selon le ministère des Transports.
Avec son Programme d’électrification du transport scolaire doté d’une enveloppe de 250 millions $ sur trois ans, le gouvernement du Québec force la main des propriétaires de flottes d’autobus jaunes. Ainsi, depuis le 1er novembre 2021, l’État exige que tout autobus scolaire nouvellement acheté roule à l’électricité. Le coût d’acquisition d’un autobus électrique est d’environ 300 000 $. Trois fois plus qu’un modèle au diesel.
L’objectif est l’atteinte d’un taux d’électrification de 65 % du parc d’autobus scolaires au Québec d’ici 2030, ce qui permettrait de réduire de près de 800 000 tonnes les émissions de gaz à effet de serre (GES). Tout ça pour en arriver, cinq ans plus tard, à l’électrification complète du transport scolaire.
Transition énergétique en marche
Transdev Québec, une filiale de la multinationale Transdev qui transporte 11 millions de passagers dans près d’une vingtaine de pays répartis sur cinq continents, assure notamment le déplacement d’écoliers dans les régions de l’Estrie et de la Montérégie.
« Tout a commencé avec trois autobus électriques. Nous en comptons maintenant 30. Ils ont été construits par Lion Électrique à Saint-Jérôme », indique Pierre Zivec en mentionnant que Transdev est le plus important opérateur privé d’autobus scolaires électriques en Amérique du Nord. « D’ici 2025, nous en aurons 120 ou 130 parmi les 150 autobus scolaires que nous possédons. Seuls les véhicules qui dorment chaque soir dans la cour de nos chauffeurs ne seront pas électriques. »
Le remplacement graduel de la flotte d’autobus jaunes de Transdev représente un investissement de 2,5 à 3 millions $ par année.
Avant de peser sur l’accélérateur et d’investir encore plus massivement dans son projet de transition énergétique, Transdev a pu bénéficier de l’aide financière du Fonds Écoleader pour réaliser une étude de faisabilité visant à déterminer si l’électrification complète de sa flotte représentait une bonne affaire sur le plan financier.
De toute évidence, l’exercice a démontré que la rentabilité du projet allait être au rendez-vous. Transdev va de l’avant et entreprend l’électrification de 50 autobus scolaires supplémentaires.
Dix millions de litres d’essence de moins
« L’arrivée de trois premiers véhicules électriques nous a confrontés à l’inconnu », expose M. Zivec. « Il fallait faire preuve d’agilité pour affronter les nouvelles situations. L’étude de faisabilité nous a permis d’analyser les choses, de réfléchir, de nous repositionner en fonction de ce que nous avons appris et d’établir les éléments qui guideront nos prochaines décisions. Évidemment, nous n’avons pas toutes les réponses à nos questions. Des études complémentaires continueront d’alimenter notre réflexion. »
En choisissant d’abandonner les véhicules thermiques au profit des autobus électriques, Transdev estime qu’elle diminuera sa consommation d’essence de 10 millions de litres d’ici 2030. Ce qui lui permettra d’abaisser les émissions de CO2 de 10 000 tonnes par année.
« Quant aux dépenses liées à l’entretien des véhicules électriques, l’expérience mondiale démontre que ça devrait coûter moins cher à moyen et long terme. Évidemment, au cours des premières années, nous avons dû apporter les ajustements nécessaires. C’est normal. C’est nouveau. Nous avons cependant le savoir-faire », indique Pierre Zivec en signalant que Transdev exploite plus de 1200 autobus électriques à travers le monde.
L’autonomie d’un véhicule électrique par rapport à celle d’un autobus propulsé à l’essence ou au diesel n’est pas un problème, selon ce dernier.
« L’autonomie que nous avons choisie correspond à l’usage des circuits scolaires que nous avons électrifiés. Pour les années à venir, il faudra apporter des améliorations afin de pouvoir desservir des circuits plus longs. Nous croyons que les avancements technologiques, particulièrement du côté des batteries, vont nous permettre de pouvoir électrifier progressivement l’ensemble de nos circuits scolaires », affirme Pierre Zivec.
D’autres avantages découlant de l’électrification du parc d’autobus scolaires sont plus difficilement mesurables. C’est le cas de la pollution sonore. « Un véhicule électrique est plus silencieux qu’un véhicule propulsé par le diesel », signale l’expert en électromobilité.