Le portrait d’entreprise leader fait partie du dossier : Survol du Centre-du-Québec, une présentation du Fonds Écoleader (FÉ), en collaboration avec Marc-André Houle, agent au FÉ de la région.
C’est par un concours de circonstances que l’entreprise AXÉ Transformation de Myriam Vallée et Éric Saint-Laurent a vu le jour en 2013 à Kingsey Falls au Centre-du-Québec. Disons d’entrée de jeu que ce couple dans la vie a de la graine d’entrepreneur et a le développement durable à cœur. En plus d’AXÉ Transformation, dont il sera question ici, ils possèdent deux autres entreprises, soit SMDK, qui œuvre dans le recrutement et le placement de main-d’œuvre, et Épinette, un service d’entretien écoresponsable.
AXÉ Transformation est une entreprise B2B (business to business) spécialisée dans la récupération de mandrins de carton pour le secteur des pâtes et papier. Éric Saint-Laurent, qui a œuvré une dizaine d’années chez Cascades notamment comme directeur des ressources humaines, raconte qu’il était déjà en étroite relation avec son ancien employeur par l’entremise de sa firme de placement de main-d’œuvre quand il a été approché pour un projet de récupération de plastique.
Au fil des discussions, c’est plutôt la récupération de mandrins de carton qui est apparue comme un projet porteur pour l’entrepreneur. Un mandrin de carton est un tube sur lequel est enroulée la fibre de papier. Cascades enroule et déroule des milliers de rouleaux de papier par année. Or, une fois qu’un mandrin est utilisé sur une machine, il ne peut plus être utilisé tel quel car endommagé aux extrémités. Auparavant, Cascades recyclait le carton des mandrins pour en fabriquer de nouveaux, mais puisque les usines utilisent différentes longueurs de mandrins, il est possible de les raccourcir afin de les réutiliser. La réutilisation, plutôt que le recyclage de la matière, représente ici un gain en termes d’utilisation de ressources énergétiques et de matières. L’entrepreneur évalue que les économies réalisées par la réutilisation de mandrins sont de l’ordre de 30 % à 40 % par rapport à un mandrin neuf. Aujourd’hui, AXÉ Transformation et ses sept employés récupèrent environ 10 000 mandrins de carton par année qui peuvent avoir une deuxième, voire une troisième vie. L’entreprise travaille d’ailleurs à trouver une façon de réusiner les mandrins les plus longs (124 pouces) afin qu’ils puissent eux aussi être réutilisés tout en conservant leurs propriétés d’origine. Clairement, on a affaire ici à une entreprise qui s’inscrit dans le modèle de l’économie circulaire.
Malgré tout, Myriam Vallée et Éric Saint-Laurent souhaitaient aller encore plus loin en matière de pratiques écoresponsables pour leur entreprise. Pour ce faire, ils ont adhéré en 2016 à une démarche stratégique et globale en développement durable, la Démarche d2, qui leur a permis d’élaborer un plan d’action et d’établir des objectifs. La réalisation de ce plan a entre autres mené à l’aménagement d’un poste de tri pour le recyclage et le compost dans la cafétéria, à l’installation de lumières à diode électroluminescente (DEL) dans l’entrepôt ainsi qu’à l’ajout d’une presse de récupération de plastique. Les entrepreneurs ont en outre fait l’acquisition de deux véhicules électriques et ont installé une borne de recharge sur le site de l’entreprise. Signe que la démarche a porté ses fruits et a eu une incidence sur l’avantage compétitif de l’entreprise, celle-ci a choisi de renouveler son adhésion en 2020 et de poursuivre son processus d’amélioration. Pour l’ensemble de ses efforts, AXÉ Transformation a été l’une des entreprises finalistes au prix Normand-Maurice en développement durable de l’édition 2018 du gala Panthéon de la Performance organisé par la Chambre de commerce et d’industrie Bois-Francs / Érable (CCIBFE).
Comme pour bon nombre d’entrepreneurs qui choisissent d’adopter des pratiques écoresponsables, la motivation d’Éric Saint-Laurent est simple : protéger l’environnement et assurer un futur viable à ses enfants et aux prochaines générations. Surtout, le développement durable est moins un choix à faire qu’une logique même de développement. Et au-delà de ses dimensions environnementales et économiques, le développement durable offre des bénéfices nets au plan social :
« Quand on implique les gens, ça crée un engouement, une synergie. Et puis, le développement durable, c’est le développement de notre entreprise. Ça nous fait voir à long terme » — Éric Saint-Laurent
Le cas d’AXÉ Transformation est intéressant à plusieurs égards. Outre les bénéfices qu’une entreprise peut tirer de l’adoption de pratiques écoresponsables, il montre comment la logique de l’économie circulaire peut constituer un vecteur de développement économique pour les régions du Québec. C’est également un cas qui illustre l’environnement d’affaires favorable au développement durable qu’on retrouve à Kingsey Falls en particulier et au Centre-du-Québec en général. Il faut certes souligner l’apport de Cascades à la construction de cet environnement. Dans cette optique, si on parle d’industries industrialisantes pour décrire l’effet d’entraînement créé par le développement d’un secteur sur d’autres secteurs à un endroit donné (ex. : l’industrie de la construction navale et le secteur de la métallurgie), il serait peut-être temps de parler d’industries « écoresponsabilisantes ».